Le Sénégal mise sur le numérique pour transformer l’économie sociale et solidaire

Le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko imprime un tournant stratégique dans la politique de développement du pays en misant sur la modernisation numérique du secteur de l’économie sociale et solidaire (ESS). Lors du conseil interministériel du 23 mai 2025, il a instruit ses ministres de bâtir une plateforme de dématérialisation des agréments pour les organisations de l’ESS. Cette initiative s’inscrit dans une ambition plus large : refonder la gouvernance, renforcer l’inclusion, stimuler la productivité locale et faciliter l’accès aux marchés pour les acteurs de l’économie alternative.

Le ministre de la Microfinance et de l’Économie sociale et solidaire, Dr Alioune Dione, a confirmé sur X, le 23 juillet, que la dynamique est lancée. La plateforme envisagée servira à gérer un fichier national des organisations ESS, mettre à jour les registres régionaux et centraliser les procédures d’agrément. Elle devra aussi assurer transparence, fluidité et coordination à l’échelle nationale, tout en intégrant des fonctionnalités de commerce électronique pour permettre une visibilité accrue des produits et services solidaires.

Au cœur de cette stratégie, le gouvernement entend également connecter les producteurs ESS à la diaspora sénégalaise. Des plateformes ouvertes intégreront des solutions fintech pour sécuriser les paiements, tracer les transactions et optimiser la logistique des exportations. Les ministères du Numérique, de l’Intérieur, du Commerce et de la Microfinance travailleront de concert sur ce projet.

Mais la réforme ne s’arrête pas à l’outil technologique. Le Premier ministre a ordonné la mise en place d’un Conseil national de l’ESS, d’un Comité interministériel de pilotage, d’un Observatoire national ainsi que de services régionaux dédiés. Il souhaite que chaque ministère désigne un point focal ESS pour favoriser une synergie transversale dans les politiques publiques.

Sur le plan économique, il a exigé l’autonomisation du Fonds d’appui à l’ESS et la création d’un régime fiscal spécifique pour encourager les coopératives productives. L’application rigoureuse d’un quota d’au moins 5 % des marchés publics en faveur des acteurs ESS sera renforcée. Le recours à des financements innovants comme les social bonds, les fonds islamiques, ou encore le crowdfunding est activement promu.

La dimension sociale du projet est aussi essentielle. Le gouvernement souhaite mutualiser les dispositifs d’entrepreneuriat féminin et solidaire, développer des mutuelles de santé communautaires et soutenir les structures locales de production. L’ESS sera intégrée dans les plans de développement territorial, avec la création d’incubateurs au sein des collectivités. La cartographie des initiatives ESS sera partagée pour orienter les efforts de soutien.

Le volet éducatif n’est pas oublié. L’ESS fera son entrée dans les programmes scolaires, universitaires et de formation professionnelle. Des coopératives étudiantes, des incubateurs, une chaire universitaire dédiée et des bourses de recherche seront créés pour soutenir les jeunes et les chercheurs. La loi d’orientation sur l’ESS (LOESS) sera vulgarisée en langues nationales pour favoriser son appropriation populaire.

Enfin, Ousmane Sonko entend mobiliser l’ensemble des ministères sectoriels pour soutenir la production locale, promouvoir les produits ESS dans les ambassades, foires et marchés publics, faciliter la certification des produits, encourager la responsabilité sociétale des entreprises et organiser une mini-industrialisation solidaire dans tous les secteurs, de l’agriculture à la culture.

Par cette approche intégrée, le Sénégal affiche une ambition forte : transformer l’économie sociale et solidaire en levier de souveraineté, d’équité et d’innovation, à l’heure où le numérique devient un moteur incontournable du développement territorial.

Source : https://afriqueitnews.com/tech-media/senegal-mise-numerique-transformer-economie-sociale-solidaire/